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La bête du Gévaudan, mythe et réalités

Connu et reconnu comme spécialiste de l’histoire du loup et de ses prédations sur l’homme, Jean-Marc Moriceau réécrit l’histoire du fameux drame qui secoua la France de la fin du règne de Louis XV, dans un récit vivant, voisin du reportage au jour-le-jour, fruit de plus de dix années de recherches passionnées.

Il y voit l’occasion d’étudier l’empreinte qu'il a laissée et dont il est le révélateur, entre mythe et histoire.

Trois questions à Jean-Marc Moriceau

Qui êtes-vous ?

Un natif de Paris passionné d’Histoire depuis l’âge de cinq ans, qui a eu la volonté et la chance de faire de sa passion son métier. Pour avoir grandi en banlieue, à Athis-Mons, j’ai travaillé sur les anciens habitants de ce lieu. En fournissant un point d’ancrage à mes recherches, ils m’ont permis de travailler sur l’histoire des campagnes françaises, qui ont été des siècles durant le théâtre des activités humaines et en particulier du XIIIe au XIXe siècle, époque bénéficiant d’une documentation extraordinairement foisonnante, permettant de travailler sur les relations humaines et la place de l’homme dans l’environnement. 

Je suis aussi, bien sûr, un passionné de généalogie, avec mes ancêtres patronymiques, remontés en Loire-Atlantique jusqu’à la fin du XVIe siècle et parmi mes ancêtres maternels, la surprise de me retrouver descendant des riches fermiers d’Ile-de-France, auxquels j’avais consacré quinze ans plus tôt ma thèse.

Pourquoi ce livre ?

D’abord parce que l’affaire de la « bête du Gévaudan » offre un excellent observatoire des campagnes françaises profondes du milieu du XVIIIe siècle, alors que le pouvoir politique et les économistes ne regardaient que les régions avancées du Nord et du Bassin parisien.
Ensuite parce que « l’Affaire » a sécrété une étonnante masse d’archives, permettant de travailler à un niveau de détail et de précision rarement accessible à l’historien, masse documentaire éclairant par ailleurs les rapports entre le loup et l’homme, dont elle est en quelque sorte un point d’orgue, avec ici tout le symbolisme du loup mangeur d’hommes. Enfin parce qu’elle permet de comprendre comment un fait divers qui a marqué des dizaines de milliers d’esprits dans la région concernée a pu passer à l’échelle nationale sinon mondiale, avec ici le rôle et le fonctionnement de la presse et des médias de l’époque. En fait, cette histoire permet de dresser un portrait en chair et en os de familles paysannes moyennes, qui auraient sans elle échappé aux radars des historiens, familles qu’elle permet d’approcher dans leur quotidien et dans leur contexte socioéconomique : le rêve de l’historien et du généalogiste que je suis.

Comment avez-vous travaillé ?

En allant « au charbon », aux Archives départementales, et d’abord dans celles des cinq départements concernés. En travaillant aux Archives nationales, à Paris comme à Pierrefitte, avec la série F10 et les « primes aux loups » sans oublier les prodigieuses ressources réunies sur mon site « Homme et loup, 2 000 ans d’histoire », qui compte aujourd’hui plus de 3 500 dossiers personnalisés : www.unicaen.fr/homme_et_loup/

Références

La bête du Gévaudan, mythe et réalités, 1764-1767, Jean-Marc Moriceau, Tallandier, juin 2021, 480 pages, 11,50 €, ISBN : 979-10-210-4864-5

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Commentaires

3 commentaires
  • Portrait de Yann

    Comment être hypothétiquement généalogiste et soutenir la thèse du loup comme diagnostic de l'affaire de la bête du Gévaudan ? Ce paradoxe induit fatalement un problème... Méconnaissance du loup ? Au 18 eme et plus tard , un quadrupède aux museau et oreilles pointues était dénommé loup par des curés... qui n était pas non plus des naturalistes dans une époque où l étude des espèces balbutiait... Bref, une accumulation d inepties bien floues qui justifient plutôt un fond de commerce au détriment d' étayer une crédibilité sur la culpabilité de canis lupus lupus. S'appuyer sur des registres de cures pour accuser une espèce elle-même mal définie au 18 eme ... c'est pathétique comme approche bien hypothétiquement scientifique,.. Cibles inutiles étudiées en généalogie dans l'affaire de la bête ?
  • Portrait de Jacques Baillon

    Mis à part l'énorme impact médiatique que cette affaire aura provoqué (et qui continue aujourd'hui) cette affaire de bêtes féroce ne diffère guère des autres affaires de "bêtes féroces" de tous poils qui ont émaillé l'histoire. Une méthode est de considérer que ces bêtes étaient des forcément des loups, une autre est de s'interroger sur leur réelle identité comme j'ai tenté de le faire dans " Drôles de loups et autres bêtes féroces" (thebookedition 2015 et 2020)
  • Portrait de Cyrille Ripoche

    Parmi autres remarques, après écoute de telle émission ou compte-rendu dont j'ai eu écho... Le fait que le présent auteur ait écarté les témoignages oculaires attestant unanimement qu'il ne s'agissait pas d'un loup habituel, bien qu'espèce familière de leur environnement... pour seul motif de non concordance avec les récits des autres affaires, bref partialité peu scientifique. Autrement dit, sans suivre l'imagination débordante de la cuirasse en métal du Pacte des loups, demeure crédible l'hypothèse de l'hybride dressé par deux criminels à tuer exclusivement les humains, à l'abri des fusils et des balles (sauf côté poitrail, logiquement non protégé)... lequel animal "laissait derrière elle" ses victimes proprement décapitées, non par arrachage mais à l'arme blanche, et entièrement dépouillées de leurs vêtements. Plus encore, l'invraisemblable dénouement (nombre de chasseurs dérisoire rapporté au périmètre du bois... et comme par hasard, c'est le père du principal suspect qui l'abat, sans la moindre reconnaissance des habitants et pour cause !). Admettons donc une exception par rapport aux autres affaires de loups anthropophages, elles tout à fait authentiques mais qui auront moins défrayé la chronique. Source : ouvrage de Michel Louis publié chez Perrin en 1992

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