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Affaire NotreFamille contre le Cantal : le département fait appel

Le directeur des archives départementales du Cantal avait prévenu : "En Arverne, je campe sur ma position. Un partenariat, c'est la main dans la main, pas la main dans la poche !". Bien décidé à bloquer les demandes de communication de la société NotreFamille, Edouard Bouyé explique aujourd'hui les raisons qui poussent le département du Cantal à faire appel de la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand. Dans ce qui devient un feuilleton juridique, les positions sont donc claires : d'un côté, la société NotreFamille dirigée par Toussaint Roze souhaite réutiliser les recensements de 1831 à 1931 afin de les exploiter commercialement en les indexant. De l'autre, les archives du Cantal s'y refusent. D'un côté, l'entreprise privée revendique un droit qui lui a été reconnu par une décision de justice, par des avis de la CADA et de la CNIL. De l'autre, le Cantal se veut le représentant du service public des "Archives départementales, fer de lance du web culturel en France, (qui) numérisent et mettent en ligne des dizaines de millions de documents d’archives" et en y consacrant "un important effort technique et financier".

L'enjeu dépasse évidemment le seul département auvergnat et bien des Conseils Généraux observent cette bataille, afin de décider quelle sera leur attitude. Contactée, la société NotreFamille n'a pas souhaité réagir. De son côté, pour faire appel, le Cantal expose trois arguments juridiques :

  • la société requérante (NotreFamille) a renoncé à sa demande initiale et a beaucoup varié dans ses demandes successives ;

  • le tribunal a insuffisamment motivé sa décision sans apporter de réponse aux arguments du département ;

  • enfin, le Cantal conteste l'interprétation de l’article 11 de la loi du 17 juillet 1978 (sur son droit à dire non).

Le Conseil Général du Cantal, par la voix de son président Vincent Descoeur (et député UMP du Cantal) a donc fait appel le 20 septembre dernier et demande un sursis à exécution, car la précédente décision oblige le Cantal à fournir les documents demandés par NotreFamille. Ce sursis est motivé par le fait "qu’il sera strictement impossible d’exiger de la société requérante la restitution des fichiers numériques, par essence duplicables à l’infini, une fois qu’ils lui seront remis. Et, s’ils sont hébergés par un sous-traitant malgache, hors de l’Union européenne, nulle saisie ne sera possible".

Le débat, beaucoup plus large que le simple contexte du Cantal porte sur la notion d'open access et d'open data. L'un est librement consultable, l'autre est librement consultable ET réutilisable, y compris commercialement. Les archives conservées aux Archives départementales font elles partie de la première ou de la seconde catégorie ? Les recensements civils et militaires, les archives judiciaires et notariales et autres peuvent-ils être concédés à une entreprise privée dans le but de les exploiter commercialement, après indexation ? Le Cantal répond qu'il fait déjà de l'indexation collaborative et n'a pas besoin des services de NotreFamille. NotreFamille rétorque que c'est la loi et que le Cantal ne peut s'y opposer... A cela, le Cantal argumente que s'il faut changer la loi, son député va le demander à la "représentation nationale". Un débat non seulement complexe, mais également passionné et explosif...

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