Augustine, un siècle de Bretagne
Voilà sept ans qu’au décès de sa grand-mère, Régis Delanoë a découvert trois petits cahiers d’écolier, dans lesquels celle-ci avait rédigé ses mémoires. Les mémoires d’une paysanne de 97 ans, témoin de son temps mais aussi d’une famille qui a su épouser les évolutions, en s’adaptant et en réussissant. Un livre doublé d’une recherche documentaire (voir interview ci-contre).
Trois questions à Régis Delanoë
Qui êtes-vous ?
Né voilà quarante-et-un an à Saint-Brieuc, j’ai grandi à Hillion, où mon père était agriculteur et sous les yeux de ma grand-mère, Augustine, dont j’ai toujours été très proche. Elle habitait la maison voisine de la nôtre, où elle est décédée à l’âge de quatre-vingt-dix- sept ans en 2018. C’était une femme qui nous parlait volontiers de sa vie, qu’elle savait raconter.
Pourquoi ce livre ?
Lorsque ses enfants lui avaient fêté ses 80 ans, ils avaient eu l’idée de lui offrir de petits cahiers d’écolier, en lui proposant d’y rédiger ses souvenirs, ce qu’elle avait fait d’assez bonne grâce. C’est ainsi qu’à son décès, la famille les avait retrouvés et que, me rendant compte que leur intérêt dépassait celui du simple cercle familial, je les avais un jour montrés à mon éditeur, qui m’avait suivi dans son analyse et m’avait tout de suite proposé d’en faire un livre original.
Comment avez-vous travaillé ?
Le premier travail avait évidemment été de les retranscrire intégralement, ce qui avait déjà demandé plusieurs mois. Ensuite, il avait fallu sélectionner, pour ne conserver que les passages les plus intéressants pour le grand public, en laissant ceux d’intérêt purement familial ou local. Mais le plus gros avait ensuite été de compléter tout cela, en croisant les sources. En interrogeant mes proches, mes parents, oncles et tantes, en retournant sur les lieux de vie d’Augustine, dont sa ferme natale, où vivent encore des cousins de mon père. J’ai également fouillé les centaines de souvenirs qu’elle avait laissés, soigneusement entreposés dans de belles et anciennes boîtes en fer blanc, dans les tiroirs d’un grand bahut breton. J’y ai trouvé aussi bien des piles de photos anciennes que des faire-part et des menus – dont celui de son mariage, en 1947 – mais aussi de nombreuses notes personnelles, des agendas, des listes de courses, des factures…, tout cela me permettant finalement d’entrer dans sa vie quotidienne. Toute une documentation que j’ai ensuite cherché à compléter, en travaillant sur les archives locales, sur l’histoire de la paroisse – avec ici une véritable mine, avec près d’un siècle de bulletins paroissiaux… – tout en ne cessant de replacer toujours toutes ces informations dans leur contexte : la guerre, la vie à la campagne et l’évolution de l’agriculture, l’histoire de l’école et celle des progrès techniques… Le dernier travail a été de « digérer » et de croiser tout cela, pour faire d’Augustine un témoin de son temps et de son milieu, tout en lui laissant sa place et son poids d’auteur, avec ses choix et ses approches. En respectant sa personnalité, ses projections et ses enseignements, le tout empreint de clairvoyance et d’humilité. J’espère y être parvenu, après avoir vécu, grâce à elle, une expérience aussi passionnante qu’émouvante.
Références
Augustine, un siècle de Bretagne, Régis Delanoë, Les Éditions du Coin de la rue, 256 pages, septembre 2024, 22,50 €, ISBN : 979-10-96883-17-2
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