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D'Elisabeth II à Charles III : le changement vu par le généalogiste

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Charles III a officiellement succédé à la reine Elisabeth II, le samedi 10 septembre 2022, suite au décès de la reine.
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The Royal Family

Mort de la « dernière reine », fin d’un monde… On a tout dit sur la disparition d’Elizabeth II, qui a profondément ému la planète tout entière. Tout dit, ou presque, en ce que le regard, particulier, du généalogiste va permettre de donner tout le relief à certains aspects de cet évènement ou plutôt à ce double évènement, puisque « la reine est morte, vive le roi ! » et que la mort d’Elizabeth II voit l’accès au trône de son fils, Charles III.

Au plan de la seule généalogie, celle de la défunte n’a plus aucun secret à livrer. On la trouvera facilement, tant sur Wikipedia, pour les six premières générations, que sur de nombreux arbres en ligne de Geneanet, ainsi sur Genroy, d’André Decloitre que, nettement mieux, sur les arbres du grand généalogiste anglo-saxon Tim Dowling ou sur la méga base Pierfit.

Des ancêtres classiques, pour une reine d’Angleterre, avec d’abord beaucoup d’Anglais et beaucoup de têtes couronnées – Elizabeth étant à la fois l’arrière-arrière-petite-fille de la reine Victoria et du roi Christian IX de Danemark, respectivement surnommés de leur temps la « grand -mère » et le « beau-père » de l’Europe. Une généalogie bourrée donc de têtes couronnées, avec aux côtés des rois d’Angleterre des diverses dynasties s’étant succédé sur le trône, tout le Gotha européen, mais avec surtout une majorité d’Anglais et plus encore de souverains protestants, laissant très peu de place aux princes catholiques de l’ensemble formé autrefois par les familles royales de France, d’Espagne, d’Autriche et d’Italie, s’alliant entre elles, face aux familles souveraines protestantes du monde allemand…

Peu de princes français dans les générations proches, qui se rattraperont largement avec pour grand premier ancêtre français royal le roi Jean II le Bon, lequel avait – curieuse coïncidence – été fait prisonnier par les Anglais – et bien sûr avec la célèbre « louve de France », Isabelle de France, la fille de Philippe-le-Bel, épouse du roi d’Angleterre Edouard II et qui avait été à l’origine de la guerre de Cent ans…

Des centaines d’ancêtres princes, y compris les roumains Dracula, princes de Valachie, aux côtés d’ancêtres plus obscurs et plus inattendus, comme les familles françaises Desmier d’Olbreuse et de Barbezières, qui valaient à la défunte de cousiner, de très très loin, avec François Mitterrand, ou encore comme le huguenot Nicolas Martiau, natif de l’île de Ré et qui avait fui la France à la révocation de l’édit de Nantes. Un ancêtre de sa lignée maternelle, car une des observations majeures de la généalogie de la défunte reine est que son père avait sans doute été le premier fils de roi à se marier en dehors des familles souveraines, avec ici la célèbre « Queen Mum », née Elizabeth Bowes-Lyon, descendante elle aussi par les femmes de plusieurs rois d’Angleterre et d’Écosse mais d’une lignée appartenant seulement à la très haute noblesse écossaise.

Elizabeth II avait en revanche fait un classique mariage dans le Gotha, en épousant en 1947 Philip Mountbatten, né quant à lui prince de Grèce et lui aussi arrière-arrière-petit-fils et arrière-petit-fils de la reine Victoria et du roi Christian IX de Danemark, avec une autre généalogie (accessible via Wikipedia et les arbres en ligne déjà mentionnés). Une généalogie plus encore bourrée de têtes couronnées, dont les Romanov, très proches, par sa grand-mère princesse de Russie, et ancêtres au nombre desquels on trouvera notre roi Charles VII…

Mais la grande observation du généalogiste sera de dénoncer ici, avec le passage d’Elisabeth II à Charles III, un grand changement de dynastie. Avec Edouard VII, arrière-grand-père de la reine décédée, c’est la maison de Saxe-Cobourg-Gotha qui, depuis 1901 et après la maison de Hanovre, à laquelle appartenait Victoria, régnait sur le Royaume-Uni, quitte à avoir décidé, en 1917 et par sentiment anti-allemand de substituer à ce nom celui de Windsor. 121 ans d’occupation du trône, par cinq souverains, sur quatre générations. Aujourd’hui, avec Charles III, fils de Philippe Mountbatten – patronyme ayant remplacé par traduction le nom lui aussi allemand de Battenberg – c’est en effet une autre dynastie qui monte sur le trône. Non pas celle de Grèce, puisque le grand-père paternel du défunt prince consort, le roi Georges Ier, qui avait été élu roi de Grèce en 1862, n’était autre qu’un fils du roi Christian IX de Danemark. Dès lors, avec pour nom patronymique originel exact celui de von Schleswig-Holstein-Sonderburg-Glücksburg, le nouveau roi d’Angleterre appartient à la Maison de Holstein, elle-même issue de la très vieille maison allemande d’Oldenbourg (cf. Wikipedia), connue depuis Egilmar, comte d’Oldenburg, né vers 1090 et aux origines mal connues…

Terminons enfin par une petite comparaison entre l’Europe dynastique de 1926, année de la naissance de la reine défunte, et celle de 2022, année de son décès.

Celle de 1926 comptait 13 monarchies, hormis Monaco, dont :

  • 3 ayant pour souverain un membre de la maison de Saxe-Cobourg-Gotha (le Royaume-Uni, la Belgique et la Bulgarie), après avoir récemment perdu le Portugal ;
  • 3 ayant pour souverain un membre de la maison de Holstein-Oldenbourg (le Danemark, la Norvège et la Grèce), après avoir récemment perdu la Russie ;
  • 1 ayant pour souverain un capétien (Bourbon) : l’Espagne.

Celle de 2022, n’en compte plus que 8 (toujours hormis Monaco), dont :

  • plus qu’une seule, ayant pour souverain un membre de la maison de Saxe-Cobourg-Gotha (la Belgique : jusqu’à l’accès au trône de l’actuelle princesse héritière) ;
  • 3 ayant pour souverain un membre de la maison de Holstein-Oldenbourg (le Danemark – jusqu’à la mort ou à l’abdication de l’actuelle reine, dont le fils est un Monpezat, la Norvège et donc désormais le Royaume-Uni) ;
  • et2 ayant pour souverain un capétien : l’Espagne (Bourbon, jusqu’à l’accès au trône de l’actuelle princesse héritière) et le Luxembourg (Bourbon-Parme).

Ce qui signifie que dans un siècle, on ne devrait plus avoir, dans le meilleur des cas – et sauf cas de mariage entre familles royales, qui n’est plus du tout au goût du jour – qu’un seul monarques issu de ces trois grandes dynasties, qui devrait être un Oldenbourg en Angleterre, en la personne du fils ou du petit-fils de Charles III.

Commentaires

2 commentaires
  • Portrait de COLETTE

    Bonjour, je viens signaler une autre erreur, dans l'article sur la situation des pays en 1926 et 2022, qui ont une monarchie, il manque la Suède ! c'est un peu fort !
  • Portrait de Leomichel

    Que d'erreurs ! La reine Elizabeth II avait avait Charles VII pour premier ancêtre royal français et non Jean II le bon. Elle était issue, deux fois, de Marie de Valois (1444-1473), une des filles du roi et d'Agnès Sorel, aïeule à la 15e génération du Prince Consort Albert de Saxe-Cobourg et Gotha. Elle descendait aussi d'une demi-sœur de François 1er, Jeanne d'Orléans (1480-1538), épouse de Jean de Longwy. De plus, sa généalogie était tout sauf classique pour un souverain britannique. Par son père, certes, elle avait les habituels ancêtres issus des familles souveraines allemandes. Mais ses ancêtres écossais et anglais, par sa mère, étaient nouveaux et balayaient le spectre social, avec des familles ducales (Cavendish-Bentinck) ou comtales classiques (Bowes-Lyons) mais aussi des banquiers anoblis (Smith) ou des familles modestes et inconnues (Salisbury, Webb, Browne, Lister).

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