Historiens et archivistes demandent à abroger le Secret Défense 1940-1970
Depuis début 2020, les documents d'archives tamponnés Secret Défense déposés dans les services d'archives ne peuvent plus être communiqués sans être auparavant "déclassifiés" ou bien expurgés. Un collectif d’associations et de personnalités demande au Premier ministre d'abroger cette disposition applicable à la période 1940-1970, car cela représente "une entrave inadmissible" dans l’accès aux archives de cette période.
L'Association des historiens contemporanéistes de l’enseignement supérieur et de la recherche, l'Association des archivistes français et l'Association Josette et Maurice Audin ont déposé auprès du Premier ministre une demande formelle d’abrogation de l’article 63 de l’Instruction générale interministérielle n°1300 (IGI 1300) sur la protection du secret de la défense nationale. Ils sont rejoints par un collectif d’historiens signataires d’une tribune sur ce sujet, publiée dans le journal Le Monde du 14 février 2020, ainsi que des juristes, des archivistes et des usagers des services d’archives.
L'IGI 1300 n'est pas récente, elle date de 2011, mais son application s’est considérablement durcie début 2020 à la demande du Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale, ce qui affecte particulièrement les lecteurs du Service historique de la Défense. Le problème est que cette instruction vient se heurter à la loi (article L. 213-2 du Code du patrimoine) qui prévoit, au contraire, que les archives publiques dont la communication porte atteinte au secret de la défense nationale deviennent « communicables de plein droit » à l’expiration d’un délai de cinquante ans, sans qu’aucune autre condition particulière ne puisse être exigée.
En février 2020, l'historien Jean-Marc Berlière, spécialiste de la police française avait mis le feu aux poudres en regrettant "que pour un universitaire qui travaille au Service historique de la Défense à Vincennes sur le contre-espionnage de 1934 à 1944, tout se ferme brutalement !" Dans les faits, depuis le 1er janvier 2020, le SHD applique de nouvelles procédures très lourdes (et parfois très longues).
En effet, "Les archivistes doivent vérifier systématiquement si les archives portent ou non le tampon Secret Défense. Le SHD s'engage à vérifier toute demande dans un délai maximal de 10 jours", avait expliqué à la RFG le directeur du SHD Pierre Laugeay. Ensuite, si les articles demandés contiennent un document "secret", le SHD lance alors une demande de déclassification qui relève de différentes autorités. La déclassification consiste à vérifier le caractère secret d'une information et si ce n'est plus secret, de placer un tampon "déclassifié" sur le document. Le délai de mise à disposition en salle de lecture peut alors atteindre plusieurs semaines.
Plusieurs assouplissements ont toutefois été appliqués par le SHD. Dans certains cas, le service peut déclassifier lui-même certains fonds sans en référer à une autre autorité ou ministère, ce qui peut faire gagner un temps précieux. Et quand un carton contient une minorité de documents classifiés, au lieu d'être placé dans une procédure de plusieurs semaines, il est d'abord communiqué au lecteur, mais les éléments Secret Défense sont placés sous enveloppe scellée que lecteur n'a pas le droit d'ouvrir.
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