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Maison de l'Histoire de France : un choix au détriment des archives notariales ?

Le choix du site des Archives Nationales pour accueillir la Maison de l'Histoire de France va t-il se faire au détriment des archives notariales parisiennes et des chartes scellées du Moyen Âge ? C'est ce que redoute l'intersyndicale des archives de France qui dénonce vigoureusement le choix présidentiel annoncé dimanche à Lascaux. La CFDT-CFTC-CGC-CGT parle d'OPA et va même jusqu'à comparer cette décision au choix du coucou, venant pondre ses oeufs dans le nid des autres... "Ce projet vient percuter les projets des Archives Nationales", commente un responsable syndical. "Le ministre de la Culture vient tout juste d'arbitrer la nouvelle répartition des fonds d'archives. Après le déménagement des collections postérieures à 1790 vers Pierrefitte et Fontainebleau, la place libérée devait nous permettre de résorber 50 ans de retard dans le versement des archives notariales qui s'accumulent chez les notaires et de disposer de l'espace nécessaire à leur préservation pour accueillir les chartes scellées du Moyen Âge. Cet espace est tout simplement vital".

En déplacement à Lascaux, Nicolas Sarkozy est resté très évasif sur le concept de Maison de l'Histoire : "Elle devra s'incarner dans un réseau de musées, dans une continuité. Ces musées constitueront le premier cercle d'un réseau appelé à tisser des liens avec les mille musées d'histoire éparpillés sur tout le territoire". Les syndicats prennent l'accent de Molière pour dénoncer cette irruption muséale : "Mais que viennent faire les Archives nationales dans cette galère ? Cela fait plus de deux siècles que les hôtels de Rohan et de Soubise incarnent cette institution, elle n'est en aucun cas réductible à un musée". Quant à l'autre annonce, celle de l'ouverture au public des jardins du quadrilatère regroupant au cœur de Paris les hôtels de Soubise et de Rohan, elle fait bondir les représentants du personnel : "ouvrir les jardins, faire visiter les salons XVIIIe siècle, organiser des expositions. Tout cela est acté… ou se fait déjà dans le cadre de l'action culturelle et éducative. La Maison de l'histoire de France va t'elle amputer les Archives nationales d'une de leurs missions fondamentales ?"

Pour être exact, l'hôtel Soubise abrite déjà depuis... 143 ans un Musée de l'Histoire de France. Créé en 1867, sous le règne de Napoléon III, par Léon de Laborde, directeur des Archives de l'époque, ce musée présentait au public un millier de documents, "un abrégé des preuves de l'Histoire de France à travers les abrégés de la Patrie". En 1950, Régine Pernoud y adosse un service éducatif. Mais en 1995, les conservateurs prennent conscience que les manuscrits et parchemins exposés en permanence pâlissent et craquellent sous la lumière. Ils les retirent pour ne les exposer que temporairement par rotation. Depuis une quinzaine d'années, ce musée se cherche, il semblait avoir trouvé sa voie dans l'organisation d'exposition très réussies comme "La Révolution à la poursuite du crime" et avec la récente refonte du parcours des visiteurs.

Toutefois, l'installation de la Maison de l'Histoire de France aux Archives Nationales n'est pas décriée par tout le monde. La Tribune de l'Art lance un débat un brin provocateur et estime que ce musée dont on aurait d'ailleurs très bien pu se passer "est la moins mauvaise des solutions, si elle vise à rouvrir au public les Monuments Historiques que l'on pouvait pourtant visiter librement il y a encore vingt ans". En attendant, l'intersyndicale appelle demain mardi 14 septembre à une assemblée générale du personnel à 10 heures. En fonction du succès de cette réunion, la communication des documents risque d'être perturbée au CARAN.

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