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Nous avons vu "Esclavage, mémoires normandes"

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L’exposition "Esclavage, mémoires normandes" se déroule dans les trois cités normandes de Rouen, du Havre et de Honfleur

Inaugurée le 10 mai dernier, date symbolique de la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leur abolition, "Esclavage, mémoires normandes" revient sur un aspect méconnu de l’histoire de la Normandie : son rôle dans l’esclavage et le poids de celui-ci dans le développement de la région.

L’exposition se déroule dans les trois cités normandes de Rouen, du Havre et de Honfleur. À Rouen – ou plutôt à Notre-Dame-de-Bondeville - , le lieu n’a pas été choisi au hasard : c’est le musée industriel de la Corderie Vallois, ancienne filature et lieu d’impression des cotonnades, qui abrite le volet de l’exposition intitulé "L’envers d’une prospérité" consacré au système économique mondial fondé sur l’esclavage. À Honfleur, c’est le musée Eugène Boudin qui traite du commerce maritime triangulaire d’une terre à l’autre, tandis que le musée Dubocage de Bléville au Havre évoque davantage les fortunes et servitudes  individuelles de l’esclavage.

Objets et documents essentiellement issus des dépôts d’archives normands retracent l’implication de la Normandie dans le développement de l’esclavage dès le XVIIe siècle. Elle est liée à l’installation de Normands aux Antilles ou à celle de comptoirs en Afrique de l’Ouest. Les statistiques présentées en rendent compte : en 1664, le tiers des propriétaires de plantations de Martinique étaient Normands. Plusieurs compagnies ont été créées par des Hauts-Normands qui ont bénéficié de privilèges et monopoles. En 1716, Rouen obtient le privilège royal de la libre pratique transatlantique, devenant avec Le Havre et Honfleur des acteurs de la traite des êtres humains.

Dieppe joua également un rôle important, notamment parce qu’elle fut un foyer de fabrication d’outils de navigation facilitant le trafic maritime, au cœur même de l’esclavage.

De nombreux Normands contribuèrent de près ou de loin et sans forcément en avoir conscience à l’industrie liée à l’esclavage. Des navires furent fabriqués par des charpentiers, des marins s’y embarquèrent, les travailleurs du textile très présents dans le Pays de Caux et les généalogies normandes (tisserands, fileurs, siamoisiers…) profitèrent à leur façon du développement de l’industrie textile locale dû au trafic humain. La célèbre « blaude » portée par les Normands a pris sa belle teinte bleue suite à l’importation de plus en plus massive de l’indigo qui remplaça la guède, aussi appelée pastel, plante tinctoriale européenne utilisée jusque-là.

Exploités au loin dans les domaines appartenant à des Normands, des esclaves et des affranchis ont aussi travaillé en Normandie, comme artisans ou domestiques dans des maisons bourgeoises. Les registres paroissiaux et des listes nominatives en attestent.

L’histoire de l’esclavage va de pair avec celle de l’évolution de l’alimentation et des pratiques domestiques. De nouveaux produits (le sucre, le café…), de nouveaux usages ont fait leur apparition au XVIIIe siècle, entraînant le développement de nouvelles industries et des savoir-faire. Les arts de la table se sont alors enrichis de nouveaux ustensiles comme la pince à sucre.

Territoire développé en partie grâce à l’esclavage, la Normandie n’en a pas moins compté des défenseurs de l’égalité entre les Hommes. Certains d’entre eux comme le peintre rouennais Théodore Géricault, dont la famille construisit sa fortune dans le commerce du tabac et donc sur ce trafic, en fut un dénonciateur à travers son art.

La biographie d’autres figures emblématiques de l’histoire de l’esclavage en Normandie est évoquée. Dans le volet rouennais de l’exposition, on apprend par exemple que le directeur du Journal de Rouen (consultable en ligne sur le site des Archives départementales), Thomas Napoléon Brière de l’Isle, né en 1806 à La Martinique et mort au Havre en 1872, était descendant d’esclave.

L’exposition se termine sur les regards contemporains et les traces actuelles laissées par l’esclavage qui a imprégné nos sociétés et nos histoires familiales.

Une riche programmation d’événements artistiques accompagne l’exposition à laquelle un site a été spécialement dédié : https://esclavage-memoires-normandes.fr

Informations pratiques

"Esclavage, mémoires normandes"

 

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