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Quand Angers rechigne à envoyer des copies intégrales de l'état civil...

Le service "état civil" de la ville d'Angers vient d'appuyer fortement sur la pédale du frein. Il vient de refuser à un généalogiste l'envoi d'une copie d'un acte de naissance de plus de 75 ans. Ou plus exactement l'envoi d'une copie intégrale avec filiation d'une personne née en 1936. Il s'agit d'un cas d'espèce tout à fait intéressant, car il correspond à un vide juridique. En effet, deux problèmes se télescopent : la protection de la vie privée (on ne sait pas si la personne en question est en vie ou non) et la loi sur les Archives de 2008 qui a abaissé le seuil de communicabilité des actes de naissance et mariage à 75 ans.

Pour motiver cette décision, la ville se retranche derrière une curieuse interprétation, brassant des éléments du code du patrimoine (la fameuse loi de 2008 sur les archives) et une instruction donnée par le procureur de la République d'Angers (visant les généalogistes successoraux pour les actes plus récents, de moins de 75 ans). Selon la lettre adressée au généalogiste que nous avons pu consulter, Angers indique que "les copies ou extraits avec filiation ne sont délivrés que sur la demande exclusive de l'intéressé, de son conjoint, de ses ascendants ou descendants en ligne directe". La ville invite donc notre chercheur soit à venir consulter l'état civil sur place, soit à solliciter le procureur de la République d'Angers pour obtenir une dérogation.

Or la loi de 2008 est très claire, les actes de naissance et de mariage de plus de 75 ans sont librement communicables. Mieux même, non seulement, ils sont communicables intégralement, mais s'agissant de documents administratifs, on peut aussi en obtenir copie à très bas coût ! Le généalogiste à l'origine de cette histoire est bien placé pour le savoir, car il s'agit de Yves Hallé, évoqué il y a un peu plus d'un an dans le n°189 de la RFG. C'est l'homme qui a fait passer les tarifs de reproduction du service central de l'état civil de Nantes de 7 € la page à 18 centimes en obtenant une décision de la CADA !

A l'époque, on lui avait opposé le même argument : "le droit d’accès à ces archives ne peut s’exercer actuellement que sous la forme d'une consultation sur place". La CADA ne l'avait pas entendu de cette oreille et dans son avis n° 2010-888, avait redit le droit à l'attention du service central de l'état civil de Nantes : "Les actes d’état civil élaborés depuis plus de 75 ans sont librement communicables à toute personne, en vertu du 4° du I de l’article L. 213-2 du code du patrimoine" et "Sous réserve que leur reproduction ne nuise pas à leur conservation, le demandeur est donc en droit d’obtenir l’envoi d’une copie de ces actes à l’adresse qu’il a indiquée". En attendant de saisir, si nécessaire la CADA, Yves Hallé a déjà préparé un courrier bien senti au Procureur de la République...

Au delà de ce cas particulier, ce dossier montre bien les limites de la loi de 2008 et l'une de ses conséquences inattendues : les personnes âgées de plus de 75 ans ne disposent pas de la même protection de la vie privée que les plus jeunes. Tout le monde peut demander et obtenir une copie intégrale de leur acte de naissance avec filiation et éventuellement de leur mariage à condition qu'il date de plus de 75 ans. Ce dernier cas est rare, mais possible : imaginez un centenaire qui se serait marié à 25 ans...

MISE A JOUR du 26 janvier 2012 : La CADA vient d'être saisie dans ce dossier concernant la ville d'Angers. A suivre donc...

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