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Supprimer le double de l'état civil : le gouvernement y pense...

Présenté au coeur de l'été, un projet de loi de Christiane Taubira prévoit tout simplement de supprimer le double exemplaire de l'état civil. Dis comme ça, cela a de quoi inquiéter, car cette disposition existe depuis l'an 1667 ! L'ordonnance de Saint-Germain en Laye a en effet imposé un double de l'état civil pour remplacer l'original en cas de disparition. Et depuis 350 ans, cette sécurité a eu l'occasion de montrer son efficacité : combien de fois l'original a t-il été brûlé, détruit par l'eau, mangé par les rongeurs, avalé par les champignons ? Et combien de fois cette situation déplorable a t-elle été sauvée par l'existence d'un double registre ? La situation de l'état civil est-elle si bien établie pour que l'on puisse se permettre de rayer d'un coup de crayon une disposition qui a fait ses preuves ?

Les généalogistes repensent avec effroi aux deux incendies qui furent fatals à l'état civil de Paris, tous deux allumés en 1871 par les communards, celui de l'hôtel de ville avec lequel flamba la collection originale des actes parisiens et celui du Palais de Justice qui emporta son double... Voilà, dis comme ça, cela peut inquiéter et cela n'a pas échappé à l'oeil vigilant du président de la fédération française de généalogie qui s'en fait écho. Sur son blog, Jean-François Pellan craint des conséquences irréversibles au nom d'économies de bout de chandelle : "A-t-on réfléchi aux coûts de reconstitution d’état civil des personnes en cas de disparition du registre papier et du traitement automatisé ? Ce coût sera bien supérieur au gain espéré". Le projet de Christiane Taubira inquiète et pas seulement les généalogistes. Le Service interministériel des archives de France a alerté les auteurs du projet de loi sur le risque que présente pour la conservation des actes d'état civil la tenue d'un seul exemplaire dans les communes. En vain.

Mais examinons à présent le projet de Christiane Taubira dans les détails. L'article 18 de cette future loi propose que la tenue des registres en deux exemplaires authentiques ne soit plus obligatoire pour les communes utilisant un procédé informatique pour l'établissement des actes. En clair, ce nouveau dispositif ne concernerait que les officiers de l'état civil qui se servent de logiciels d'aide à la rédaction. C'est à dire à peu près toutes les communes dans lesquelles il y a des maternités et des hôpitaux où les naissances et les décès sont enregistrés. Il n'y a guère que nos communes rurales qui n'ont pas besoin d'un tel équipement pour inscrire quelques rares mariages et les décès accidentels survenus sur leur territoire.

Ce texte suppose donc que la sécurité matérielle des actes est assurée puisqu'un seul exemplaire suffit dans le dispositif envisagé. En est-on bien sûr ? Il aurait également une conséquence inattendue, les archives départementales perdraient leur vocation à conserver l'état civil, puisqu'en l'absence de double, l'original serait conservé par la mairie. Les petites communes, depuis une disposition récente, n'ont d'ailleurs même plus obligation de déposer leurs archives au service départemental. Rien n'est encore voté ni même discuté, mais un seul exemplaire des registres en mairie et plus d'archives de l'état civil aux AD, est bien cela que l'on veut ?

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