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A voir aux Archives nationales : l’ordonnance de 1944 ouvrant le droit de vote aux femmes

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Ordonnance du 21 avril 1944 portant organisation des pouvoirs publics en France après la Libération. L’article 17, très court, indique : "Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes". Il est voté par 51 voix contre 16, le 27 mars 1944, par l’Assemblée consultative provisoire. L’ordonnance elle-même est signée par le général de Gaulle, président du Comité français de la libération nationale, le 21 avril, à Alger. (Archives nationales, A//1902)
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Archives nationales

Lancé à l’automne 2021 avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, poursuivi au printemps avec le décret d’abolition de l’esclavage de 1848, le cycle « Les Essentiels » des Archives nationales continue avec la présentation au public de l’ordonnance du 21 avril 1944 instituant le droit de vote des femmes.

La Révolution a instauré une première fois le suffrage universel mais « en oubliant la moitié de l’humanité, 12 millions de femmes et 700 000 esclaves », a souligné Bruno Ricard, directeur des Archives nationales, lors de l’inauguration de l’exposition le 22 septembre, faisant ainsi le lien avec les deux « Essentiels » précédents.

De fait, la petite exposition accompagnant le texte retrace les 150 ans de lutte pour ouvrir le droit de vote aux femmes, de la révolutionnaire Olympe de Gouges (1743-1793) - pour qui la femme, si elle avait le droit de monter sur l’échafaud, devait aussi avoir celui de « monter à la tribune » - jusqu’aux suffragistes de l’Entre-deux-guerres qui rallièrent à leur cause la Chambre des Députés (dès 1919) mais, lors de six votes, se heurtèrent au conservatisme et à la misogynie du Sénat.

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2. Affiche "Les Françaises veulent voter" [vers 1920], CP/BB/18/6485 57 BL 160.
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En 1942, le général de Gaulle, dans sa Déclaration aux journaux clandestins, relance le débat en affirmant qu’« une fois l’ennemi chassé du territoire, tous les hommes et toutes les femmes de chez nous éliront l’Assemblée nationale qui décidera souverainement des destinées du pays. » De cette prise de position découle l’article 17 de l’Ordonnance portant organisation des pouvoirs publics en France après la libération adoptée à Alger le 21 avril 1944 par le Comité français de Libération nationale et confirmée par le Gouvernement provisoire le 9 août 1944.

L’ordonnance comporte au total 33 articles sur l’organisation des futures élections dont le 17e stipule que « les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes ».

« Cette ordonnance a créé un avant et un après », a déclaré Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, lors de l’inauguration. « Notre vie politique s’est considérablement féminisée et avec elle toute la société s’est améliorée. »

Mais elle voit aussi dans l’exposition « un appel à la vigilance » : « les droits des femmes sont fragiles, nous l’avons constaté récemment avec l’accès à l’IVG remis en cause aux États-Unis. »

Rima Abdul Malak, ministre de la Culture, a quant à elle évoqué un « aller-retour entre les combats du passé et les chantiers qu’il nous reste à porter aujourd’hui et demain. »

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Bruno Ricard, directeur des Archives nationales, inaugure l’exposition le 22 septembre en compagnie des ministres de la Culture, Rima Abdul Malak, et de l’Egalité entre les femmes et les hommes, Isabelle Lonvis-Rome.
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Véronique Tison

Avec « Les Essentiels », les Archives nationales proposent au public un accès gratuit et contextualisé à des documents emblématiques de notre Histoire avec pour ambition de donner à voir, dans leur matérialité, des actes fondateurs de notre état de droit, et participer ainsi à la cohésion nationale et à la lutte contre la désinformation.

Plus de 40 000 visiteurs ont ainsi pu voir la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 présenté à l’automne dernier, et ils étaient 54 000 pour le décret de l’abolition de l’esclavage de 1848. Le choix de présenter l’ordonnance de 1944 a été plébiscité lors d’un vote proposé aux visiteurs et internautes lors du lancement du cycle, parmi une sélection de 12 textes, loin devant l’Ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 – qui faisait du français la langue officielle du droit et de l’administration – et l’Édit de Nantes sur la tolérance religieuse.

Le cycle s’achèvera en 2023 avec la loi Badinter du 9 octobre 1981 portant abolition de la peine de mort. Pour la suite, les Archives nationales réfléchissent à un nouveau cycle, qui pourrait s’appeler « Remarquables », présentant des documents historiques célèbres mais non plus en résonnance avec nos valeurs démocratiques contemporaines.

En attendant, les deux premiers « Essentiels » poursuivent leur chemin. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 est actuellement exposée à l’Hôtel du département et de la préfecture de Seine-Saint-Denis, à Bobigny, où elle est mise en avant lors des cérémonies d’accueil dans la citoyenneté française, et le décret de 1848 abolissant l’esclavage sera bientôt présenté à La Rochelle.

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