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Les archives judiciaires de la guerre d'Algérie ouvertes avec 15 ans d'avance

Le 10 décembre 2021, Roselyne Bachelot avait créé la surprise en promettant d'ouvrir les archives judiciaires de la guerre d'Algérie. L'annonce a été rapidement suivie d'effet, puisqu'un arrêté interministériel publié le 23 décembre a ouvert une dérogation générale. 

Cet arrêté permet la consultation immédiate "des archives publiques produites dans le cadre d'affaires relatives à des faits commis en relation avec la guerre d'Algérie entre le 1er novembre 1954 et le 31 décembre 1966". Selon le code du patrimoine, elles n'étaient consultables qu'à l'issue d'un délai de 75 ans, les chercheurs auraient simplement pu commencer à explorer ces fonds à partir de 2029.

Il s'agit d'une réelle ouverture, puisque la décision -dont on ne connaît pas encore les modalités pratiques d'application- est signée de 4 ministères possédant des archives sur ce sujet. Pour la Culture, il s'agit des Archives nationales, des Archives nationales d'outre-mer, des services départementaux d'archives ; pour le ministère des Armées, il s'agit des fonds conservés par le Service historique de la Défense ; pour le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, ce sont les archives qu'il conserve dans ses centres, pour l'Intérieur, le texte vise les archives de la préfecture de police, mais ne parle pas de celles des "services". 

Il apporte en effet des restrictions à la communication : "les documents mentionnés se rapportant à une personne mineure ou dont la communication est de nature à porter atteinte à la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables impliquées dans des activités de renseignement, ou dont la communication porte atteinte à l'intimité de la vie sexuelle des personnes" qui restent dans le cadre fixé par le code du patrimoine. 

Historiens et archivistes se sont réjouis de cette bonne nouvelle qui ne règle cependant pas la totalité de la question, puisque cet arrêté ne parle que des  « enquêtes de police judiciaire » et des « affaires portées devant les juridictions » et non toutes les autres archives relatives à ce conflit. Deux autres dérogations générales avaient précédé cet arrêté, elles concernaient en septembre 2019, les fonds relatifs à « la disparition de Maurice Audin » ; et en avril 2020, les archives de la Commission de sauvegarde des droits et des libertés individuelles, créée en 1957 pour enquêter sur la répression militaire en Algérie. 

La politique d'ouverture des archives de la guerre d'Algérie voulue par Emmanuel Macron, marquée par des va-et-viens, a suscité des réactions mitigées. Des craintes ont été émises sur la découverte possible de cas de torture et la mise en responsabilité de l'armée. D'autre part, des voix se sont élevées pour constater qu'il est temps de faire toute la transparence sur cette période. Aux historiens, aux chercheurs, parfois aux généalogistes d'accomplir ce travail de mémoire désormais rendu possible. 

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