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Droit à l'oubli : le projet de règlement européen menace bien les archives

La pétition de l'association des archivistes français (AAF) contre le projet de règlement européen a recueilli plus de 40.000 signatures. Autant d'opposants à "l'amnésie collective programmée" de l'Europe montre bien la très large inquiétude suscitée par ce texte qui prévoit d'anonymiser ou supprimer les données personnelles, "une fois que le traitement pour lequel elles auront été collectées sera achevé, ou passé un court délai".

Cependant, cet avis n'est pas partagé par tous. Le collectif Savoirscom1 a publié une tribune contestant formellement cette vision des choses sous le titre : "Données personnelles : non, le règlement n’est pas un danger". Sans entrer dans les détails, le fonctionnement européen étant particulièrement complexe, l'auteur estime que l'AAF s’est tout simplement trompée de texte : ça n’est pas la proposition de règlement, mais le projet de rapport – sur la proposition de règlement – du député européen Jan-Philipp Albrecht (Verts) qui pose problème, comme le résume un article de Rue89.

Interrogé par la Revue Française de Généalogie, Hervé Lemoine, le directeur des Archives de France estime pourtant que l'inquiétude des archivistes et des généalogistes est bien justifiée et prépare d'ailleurs "une réponse interministérielle avec les ministères de la Culture, des Affaires étrangères, des Affaires européennes, de la Défense qui sont sur la même position : vent debout, car ce projet de règlement européen méconnaît le code du patrimoine et ignore que les services d'archives gèrent déjà les données personnelles".

Dans Rue89, Hervé Lemoine cite quelques cas concrets pour lesquels la proposition de règlement européen, si elle était votée en l’état, serait problématique. Par exemple, les parents d'un enfant handicapé ayant passé des années à s'occuper de lui jusqu'à son décès ne pourraient pas faire valider leurs trimestres de cotisation de retraites supplémentaires. Le dossier de la sécurité sociale devant en effet être impitoyablement détruit car sa finalité première est le paiement de l'allocation.

Autre exemple, impossible d'obtenir la nationalité française, si vous descendez d'un combattant pour la France durant la guerre d'Algérie, le dossier nominatif ayant été anonymisé ou détruit. Et que dire de l'utilité des terribles listes des juifs dressées par les nazis ? Elles permettent aujourd’hui l’indemnisation des familles. Ces exemples montrent qu'il est bien difficile de prévoir aujourd'hui quels seront les besoins en données personnelles de demain.

Pour y voir plus clair dans le projet de règlement européen, l'AAF a recensé dans un tableau les arti­cles et amen­de­ments incri­mi­nés (et notam­ment ceux à l’arti­cle 83 du pro­jet de règle­ment) et les ris­ques et dan­gers que cha­cun com­porte.

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